LES
QUESTIONS DU BOSS
1-
N'y a-t-il que du plaisir, dans l'écriture, ou t'est-il déjà
arrivé de ressentir une certaine forme de douleur, de souffrance,
dans cet exercice ?
S’il
n’y avait que du plaisir dans l’écriture, je crois que nous n’y
reviendrions pas… L’homme est masochiste, il aime gratter les
cicatrices pour qu’elles continuent de saigner longtemps.
j’ai tendance à comparer l’écriture à un sport, il arrive parfois d’en ressortir lessivé, à plat, mais content.
j’ai tendance à comparer l’écriture à un sport, il arrive parfois d’en ressortir lessivé, à plat, mais content.
2-
Qu'est-ce qui te pousse à écrire, finalement ?
Qu’est-ce
qui te pousse à boire une bière le soir avec tes potes plutôt
qu’une fraise à l’eau ? L’instinct, l’envie d’y
revenir, d’aller fouiller plus loin, de pousser les portes, de voir
où cela va mener, de refaire le monde ou bien d’en inventer
un.
J’ai ce principe qui me tient à cœur depuis des années : Nourrir les monstres sous les lits. Cela signifie « donne du grain à moudre à tes pulsions les plus mauvaises », mais aussi « affronte les monstres planqués, sache qu’ils existent, ne les nie pas et discute avec eux. ».
J’ai ce principe qui me tient à cœur depuis des années : Nourrir les monstres sous les lits. Cela signifie « donne du grain à moudre à tes pulsions les plus mauvaises », mais aussi « affronte les monstres planqués, sache qu’ils existent, ne les nie pas et discute avec eux. ».
3-
Comme on le constate aujourd'hui, tout le monde écrit ou veut s'y
mettre. Sportifs, stars du show biz, présentateurs télé,
journalistes, politiques, l'épicier, ta voisine... de plus, des
sites proposant des services d'auto-édition pullulent sur le net. Ça
t'inspire quoi ?
Pas
grand-chose. Tout est accessible aujourd’hui, tout le monde est
photographe, tatoué, chanteur, écrivain, artiste. Tout le monde
peut tenter l’aventure, bien entendu, mais si tu ne ressens pas ce
truc au fond, cette chose qui te dévaste, si écrire ne te fais pas
plus de mal que de bien, si tu fais ça pour avoir ton selfie avec
Begbeider ou Moix, putain, arrête tout. Tout de suite.
4-
Le numérique, le support d'internet, les liseuses, les ebook, les
réseaux sociaux, sont une révolution pour les auteurs et bousculent
également le monde de l'édition. Que penses-tu de ce changement ?
C’est
un cercle vicieux, on rejoins ta précédente question. Les réseaux
sociaux ont tout rendu accessible, la musique (avec MySpace), la
photographie (Instagram), l’écriture (blogs innombrables). Tout
n’est pas à jeter, loin de là, cela permet d’ouvrir d’autres
portes aussi, mais c’est dangereux pour deux raisons à mon sens :
on se noie dans ce flot d’information sans ordre d’importance, et
on perd notre identité / intimité.
5-
Il semble que de plus en plus, les auteurs prennent en charge leur
communication, font leur publicité, créent leurs propres réseaux,
prolongeant ainsi le travail de l'éditeur de façon significative.Te
sers tu toi aussi de ce moyen pour communiquer sur ton travail,
annoncer ton actualité, discuter avec tes lecteurs ou d'autres
auteurs et ainsi, faire vivre tes livres plus longtemps ?
Je
ne dirais pas que je prends en charge ma communication, j’ai cette
chance d’avoir un soutien indéfectible de la part de la maison
Anne Carrière. Cependant, je critique ce système de réseaux
sociaux dont je suis moi-même addict. En effet, j’y passe des
heures, je discute souvent, je ne ferme pas les portes. C’est
risqué et cela prend beaucoup trop de temps. Mais ce contact est
essentiel pour moi. Il me permet d’avancer, de corriger mon
travail, d’apprendre, d’évoluer, de grandir.
6-
On dit qu'en 25 ans, le nombre de livres publiés a été multiplié
par deux, leur tirage ayant baissé de moitié pendant cette même
période. Comment sortir le bout de sa plume de cette masse de
publications ? Être visible ? N'est-ce pas décourageant
pour les jeunes auteurs ? Que leur dirais-tu ?
On
rejoint toujours ce même flot insondable d’informations, de
nouveaux venus, talentueux ou pas. Décourageant je ne sais pas, si
ça brûle au fond de ton bide, tu continueras à écrire, pas de
découragement possible.
7-
Les relations entre un éditeur, ou un directeur de collection, et un
auteur, pourraient faire l'objet d'une psychanalyse, me disait un
écrivain, récemment. Qu'en penses-tu ? Comment analyserais-tu
cette relation que tu entretiens avec eux.
Haha !
J’ai déjà entendu ça quelque part ! Heureusement, ce n’est
pas mon cas, j’entretiens (étrange mais vrai) des relations très
saines avec mon éditeur. Certes, il me pousse dans mes
retranchements, il me pousse à bout, mais simplement dans le but de
travailler mieux. On se creuse parfois la tête ensemble quand le
récit couaque, ce sont des journées de brainstorming, mais jamais
il ne m’impose ses idées, jamais sa méthode, jamais de diktat,
juste de l’échange sain. Incredible, but true.
8-
J'ai pensé longtemps, et ma bibliothèque s'en ressentait, que le
noir, le polar, était une affaire de mecs. Les coups durs, la débine
et la débauche, les gangsters, la baston, les armes, les crimes et
la violence en général… une histoire de bonshommes. Aujourd'hui,
les femmes sont de plus en plus présentes dans l'univers du polar.
Grâce au Trophée, j'ai pu me rendre compte qu'il y avait de
nombreux auteurs femmes dans ce genre. Ce n'était pas le cas il y a
quelques décennies.
Quelles
réflexions cela t'inspire-t-il ? À quoi cela est il dû, selon
toi ? En lis-tu et, si oui, Lesquelles ?
Non
seulement les femmes sont présentes, mais elles se défendent comme
des lionnes. J’entends dire que nous sommes plus tordues, plus
sournoises. Qu’on pince là où ça fait mal. En fait je crois que
nous nous défendons avec nos armes, on nous a pas donné les muscles
alors on fait dans le cérébral. On parle peu de braquage mais
beaucoup de torture (mentale souvent).
Etre une femme, c’est manger des hamburgers, c’est insulter son chat, c’est regarder des films d’horreur en demandant encore. Les codes ont changé, Boss. Va falloir t’y faire !
Etre une femme, c’est manger des hamburgers, c’est insulter son chat, c’est regarder des films d’horreur en demandant encore. Les codes ont changé, Boss. Va falloir t’y faire !
9-
Pourquoi as-tu accepté de participer à ce Trophée ?
Je
trouve le principe génial. Lire à l’aveugle des nouvelles écrites
par des auteurs de tout bord. Découvrir sans à priori. Accepter et
se faire pulvériser sur place. J’adore.
LES
QUESTIONS DE MADAME LOULOUTE
1-
Vie professionnelle, vie de famille, salons et dédicaces, à
l'écriture reste-t-il une place ?
C’est
un puzzle complexe à 8658 pièces, j’ai construit les bords, c’est
déjà pas mal. Il reste la place qu’on lui accorde. Ecrire, ce
n’est que l’outil, penser c’est tout le temps.
2-
A-t-on encore les idées claires, quand tous nos héros broient du
noir ?
On
vit, on mange, on dort, on baise avec nos personnages. De la
polygamie mentale. Ca te détraque un peu, forcément.
3-
La rentrée littéraire approche. Un livre, ça va, 560, où est-ce
qu'on va ?
C’était
mieux avant, ma bonne dame….
4-
Le dicton du jour : À la saint Grégoire, sort un livre de ton
placard. Je t'écoute.
Le
Livre de Jérémie, JT LEROY/Laura Albert (et oui, un femme qui s’est
fait passer pour un homme, pour entrouvrir les portes, la bougresse).
Difficilement trouvable celui-ci. Une putain de pépite tranchante et
abjecte. Chaque phrase fait mal et le récit possède une richesse
incommensurable.
5-
Boire ou écrire, faut-il choisir ?
J’associe
l’alcool à la joie pure, l’écriture à la déchirure. Je ne
choisis pas, mais je ne peux faire les deux simultanément
6-
La littérature est le sel de la vie. Passe moi le poivre.
S’il-te-plait,
c’est pour les chiens ?
7-
Lire aide à vivre. Et écrire ?
Ecrire
aide à ne pas tuer sans mobile valable.
8-
Une anecdote à nous narrer, sur un salon, lors d'une dédicace,
d'une table ronde, un événement touchant, drôle, étrange… ?
J’aime
piquer la place des people dans la file d’attente pour aller faire
pipi.
Nous
te remercions d'avoir répondu à nos questions et d'être présent(e)
avec nous, pour cette troisième édition du Trophée Anonym'us.
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