mercredi 16 janvier 2019

L'interview de la semaine : Nick Gardel



Cette année, ce sont les auteurs eux-mêmes qui ont concocté les questions de l’interview, celles qui leur trottent dans la tête, celles qu’on ne leur pose jamais, ou tout simplement celles qu’ils aimeraient poser aux autres auteurs.




Aujourd’hui l’interview de Nick Gardel !




1. Certains auteurs du noir et du Polar ont parfois des comportements borderline en salon. Faites-vous partie de ceux qui endossent le rôle de leurs héros ou protagonistes pendant l'écriture, histoire d'être le plus réaliste possible ?
Bande de psychopathes !
Pour ma part, ma psychopathologie est plus en amont. Mes personnages sont une grande part de moi. J’aime le son de l’os qui craque, j’aime l’orteil sur la table basse, j’aime la porte de placard.
2. Douglas Adams est promoteur de 42 comme réponse à la vie, l’univers et le reste. Et vous quelle est votre réponse définitive ?
42 est plus qu’une réponse, c’est un mode de vie. Dans « La vie, l’amour, les vaches » (qui déjà est un titre ultime), un personnage utilise la phrase la plus aboutie de la création pour clore une dispute.
« Je te hais, je te hais, je te hais tellement. Si la haine était un peuple, je serais la Chine ! »
3. Y a-t-il un personnage que vous avez découvert au cours de votre vie de lecteur et avec lequel vous auriez aimé passer une soirée ?
Sans aucune hésitation Arsène Lupin. Juste pour qu’il me confirme qu’il déteste ce bouffon sautillant à fausse barbe que fut Georges Descrières.
4. Si tu devais avoir un super pouvoir ce serait lequel et pourquoi?
A chaque fois que j’imagine un super pouvoir, je pense surtout aux défauts qui l’accompagnent. Trouver les points d’intérêt scénaristiques. Comme cette blague du type dans le désert qui veut être blanc, avoir de l’eau et voir des culs et se retrouve en cuvette de chiotte. C’est le principe même des nouvelles du recueil « AZAZEL » d’Isaac Asimov. J’adore. Je me souviens d’un exercice de physique qui nous demandait de calculer la distance d’arrêt que mettrait Superman, pied au sol, pour stopper un camion lancé à pleine vitesse. C’était 27 kms si je me souviens bien.
5. Est-ce que tu continuerais à écrire si tu n'avais plus aucun lecteur ? (même pas ta mère)
Réponse facile. Je n’ai déjà aucun lecteur. L’acte d’écrire est totalement déconnecté du lecteur. C’est un acte solitaire sans être masturbatoire. Je raconte un truc du mieux que je peux. Je joue avec les mots pour me faire marrer ou pour me dire que je suis un être humain pas trop dégueu. Si des lecteurs adhèrent c’est un bonus, mais absolument pas un initiateur.
6. Quel a été l'élément déclencheur de ton désir d'écrire ? Est-ce un lieu, une personne, un événement ou autre ?
Une phrase qui me trottait en tête. Plutôt le début d’un dialogue (si tu ouvres encore ta gueule, je fous mon poing dedans). Le défi de me dire que j’en étais capable.
7. Est-ce que le carmin du sang de ses propres cicatrices déteint toujours un peu dans l'encre bleue de l'écriture ?
Forcément. Je ne suis qu’une plaie d’égo, un handicapé social trop radin pour déléguer à un psy le pouvoir de faire de l’argent avec mes déviances. C’est une question qui rejoint la corrélation auteur/personnage, tous mes personnages sont moi, aucun ne l’est vraiment.
8. Penses tu qu'autant de livres seraient publiés si la signature était interdite ? Et toi, si comme pour le trophée Anonym'us, il fallait publier des livres sous couvert d'anonymat, en écrirais-tu ?
Difficile question. Sans signature j’écrirais toujours, mais j’adore être lu et qu’on sache que c’est moi qui ai accouché de cette merveille littéraire d’une portée universelle.
9. Pourquoi avoir choisi le noir dans un monde déjà pas rose ?
Il n’y a de véritable humour que l’humour noir. Les blagues pour enfants sages n’en sont pas. Le noir est le plus grand terrain de jeu qui soit.
10. Quelles sont pour toi les conditions optimales pour écrire ?
Tout le temps. Le fichier en cours reste ouvert sur l’ordinateur et je le complète ou le corrige en passant, ou en m’y mettant sérieusement.
11. si vous deviez être ami avec un personnage de roman, lequel serait-ce?
Certains de mes personnages sont mes potes. Mais dans la littérature qui a pignon sur rue, j’irai bien boire une bière avec Isidore Bautrelet de l’Aiguille Creuse ou encore R. Daneel des romans d’Asimov et pourquoi pas Yerruldegger si on pouvait éviter le thé salé au beurre et le Bodog de marmotte.
12. Quel est ton taux de déchet (nombre de mots finalement gardés / nombre de mots écrits au total ) ? Si tu pouvais avoir accès aux brouillons/travaux préparatoires d’une œuvre, laquelle serait-ce ?
Véritablement aucune idée. En général j’écris assez juste en premier jet. Mais le premier jet est déjà l’aboutissement d’un malaxage des mots, d’une recherche dans la phrase. Ça influe forcément sur le taux de déchet. Il m’arrive de supprimer des pans entiers ou, au contraire, de rajouter des chapitres pour préciser des motivations.



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