mardi 13 décembre 2016

Dominique Maisons sous le feu des questions

Les questions du Boss.

N'y a-t-il que du plaisir, dans l'écriture, ou t'est-il déjà arrivé de ressentir une certaine forme de douleur, de souffrance, dans cet exercice ?
  • Je souffre tous les jours quand j’écris, malheureusement, les moments de plaisir sont toujours précédés par la douleur du labeur. Rien n’est gratuit, et pour se sentir libre et léger sur la feuille de papier, il faut soulever beaucoup de fonte documentaire et s’user les jointures sur des dictionnaires.

2- Qu'est-ce qui te pousse à écrire, finalement ?
  • La liberté que cela permet, la feuille blanche est un des derniers endroits où on peut faire ce que l’on veut, quand on le veut… c’est précieux.

3- Comme on le constate aujourd'hui, tout le monde écrit ou veut s'y mettre. Sportifs, stars du show biz, présentateurs télé, journalistes, politiques, l'épicier, ta voisine... de plus, des sites proposant des services d'auto-édition pullulent sur le net. Ça t'inspire quoi ?
  • Le soleil brille pour tout le monde… mais les ebook auto(non)édités qui pullulent sur Amazon sont hélas souvent de la merdasse noire… Il faut un peu de respect pour le lecteur et pour la langue, sortir des trucs aussi épouvantables est parfois un peu injurieux pour ceux qui tombent dessus.

4- Le numérique, le support d'internet, les liseuses, les ebook, les réseaux sociaux, sont une révolution pour les auteurs et bousculent également le monde de l'édition. Que penses-tu de ce changement ?
  • Voir plus haut… J’ai envie de dire que la liberté va avec la responsabilité et que la facilité n’excuse pas tout. On voit passer de sacrés bouses… mais on est dans un monde où tout le monde croit au conte de fées et à la notoriété qui tombe du ciel… La figure de l’écrivain est désacralisée, il ne reste que l’illusion de la célébrité, certains écrivent comme ils jouent au loto. C’est un peu triste, mais il y a bien pire.

5- Il semble que de plus en plus, les auteurs prennent en charge leur communication, font leur publicité, créent leurs propres réseaux, prolongeant ainsi le travail de l'éditeur de façon significative. Te sers tu toi aussi de ce moyen pour communiquer sur ton travail, annoncer ton actualité, discuter avec tes lecteurs ou d'autres auteurs et ainsi, faire vivre tes livres plus longtemps ?
  • Oui, bien sûr. Les réseaux sociaux sont un formidable outil d’information, de communication, de découverte. Il faut en user avec courtoisie et originalité. Il ne faut pas non plus se transformer en spammeur fou, en bateleur de foire, et VRP monomaniaque de soi-même. Si on garde son égo dans sa poche, les réseaux sociaux sont un formidable outil de dialogue et de découverte.

6- On dit qu'en 25 ans, le nombre de livres publiés a été multiplié par deux, leur tirage ayant baissé de moitié pendant cette même période. Comment sortir le bout de sa plume de cette masse de publications ? Être visible ? N'est-ce pas décourageant pour les jeunes auteurs ? Que leur dirais-tu ?
  • Creuser patiemment son sillon, ne pas attendre le grand jour et être fier de ce qu’on fait. Il faut de la patience, du labeur et du talent. Le monde de l’édition ce n’est pas « La Nouvelle star », on peut écrire toute une vie sans gagner sa vie en le faisant et en gardant un lectorat restreint. Baudelaire est mort dans la misère, rien n’est dû. Si on n’est pas prêt à accepter ça, il vaut mieux faire autre chose.

7- Les relations entre un éditeur, ou un directeur de collection, et un auteur, pourraient faire l'objet d'une psychanalyse, me disait un écrivain, récemment. Qu'en penses-tu ? Comment analyserais-tu cette relation que tu entretiens avec eux.
  • Pragmatique, amicale, sereine. Je suis un mec simple et assez facile à gérer, tout baigne…pas besoin de psy. Mais j’ai la chance d’avoir une éditrice formidable. (bisous Marie !)

8- J'ai pensé longtemps, et ma bibliothèque s'en ressentait, que le noir, le polar, était une affaire de mecs. Les coups durs, la débine et la débauche, les gangsters, la baston, les armes, les crimes et la violence en général… une histoire de bonshommes. Aujourd'hui, les femmes sont de plus en plus présentes dans l'univers du polar. Grâce au Trophée, j'ai pu me rendre compte qu'il y avait de nombreux auteurs femmes dans ce genre. Ce n'était pas le cas il y a quelques décennies.Quelles réflexions cela t'inspire-t-il ? À quoi cela est il dû, selon toi ? En lis-tu et, si oui, Lesquelles ?

  • C’est cool, on peut draguer sur les salons et ça sent moins la chaussette !
    Sinon, plus sérieusement, je n’aime pas me livrer à des dissertations sur ce qui est féminin ou
    ce qui ne l’est pas. Les femmes sont des auteurs comme les autres. Si elles écrivaient peu de polar avant, c’est parce que les éditeurs (et les lecteurs) étaient d’épouvantables sexistes (elles n’avaient pas non plus le droit de vote…). J’en ai une ribambelle dans ma bibliothèque et j’en suis très content ! (Sandra Martineau, Claire Favan, Armelle Carbonel, Julie Ewa, Megan Miranda, Laura Kashishke, Joyce Carol Oates, Gaelle Perrin Guillet… et beaucoup d’autres !)

9- Pourquoi as-tu accepté de participer à ce Trophée ?
  • Pour me sortir de ma misère affective, mon psy m’a dit qu’il fallait que j’aille vers les autres…Tu veux être mon copain, dis ?

Les questions de Mme Louloute.


1- Vie professionnelle, vie de famille, salons et dédicaces, à l'écriture reste-t-il une place ?
  • Pas assez grande, mais quand on veut, on peut, nom de Dieu !

2- A-t-on encore les idées claires, quand tous nos héros broient du noir ?
  • On peut parfois être perturbé parce qu’on écrit, il faut avoir des racines solides pour ne pas se laisser emporter, c’est vrai.

3- La rentrée littéraire approche. Un livre, ça va, 560, où est-ce qu'on va ?

  • L’abondance de biens ne nuit pas ! Faites votre choix !

4- Le dicton du jour : À la saint Grégoire, sort un livre de ton placard. Je t'écoute.
  • Laetitia ou la fin des hommes d’Ivan Jablonka, un livre que tout auteur de polar devrait lire pour ne pas perdre de vue la décence et le respect dont on doit faire preuve quand on s’attaque aux crimes et aux faits divers… Marre de ces livres qui glorifient des serial killers et qui transforment (au mépris des victimes) des abrutis paumés et meurtriers en génies du crime médiatisés…

5- Boire ou écrire, faut-il choisir ?
  • Naaaan, j’ai essayé, on peut !

6- La littérature est le sel de la vie. Passe moi le poivre.
  • La littérature c’est mille vies à portée de main.

7- Lire aide à vivre. Et écrire ?

  • Aide à mieux vivre !

8- Une anecdote à nous narrer, sur un salon, lors d'une dédicace, d'une table ronde, un événement touchant, drôle, étrange… ?

  • Un salon passé aux côtés de Guy Montagné, à qui chacun de ses visiteurs demandait de raconter une blague… Il a raconté environ 50 fois la même blague dans la journée. J’aurais pu m’immoler sur mon stand si je l’avais entendue une seule fois de plus…


Nous te remercions d'avoir répondu à nos questions et d'être présent(e) avec nous, pour cette troisième édition du Trophée Anonym'us.


















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