1-
Es-tu écrivain, romancier, auteur ? Vois-tu une nuance entre ces
termes ?
Je
me considère plus comme un auteur car j’ai aussi écrit des bouts
de pièces de théâtre, de la poésie, des scénarios de courts
métrages et de bande dessinée. Donc auteur, écrivain, ça me va.
Par contre, le terme romancier sous-entend un genre particulier,
j’adhère moins.
Qu'est-ce
que ces mots représentent, pour toi ?
Bukowski
disait à ce propos : «Je ne me lève pas chaque matin en me
disant, je suis un écrivain, je suis un écrivain ! » Je
ne sacralise pas la fonction, je ne me sens pas plus malin que les
autres, je tente juste de rendre compte de ce que j’observe du
monde par le biais de l’écriture tout en cherchant à en dégager
une certaine universalité.
2- Écrivain/Carrière. Ces deux mots sont-ils compatibles ? Y penses-tu ? Anticipes-tu cet éventuel avenir.
Je
n’y pense pas, trop peu d’auteurs arrivent à en vivre, à moins
qu'atteints subitement du syndrome de la lucidité, les lecteurs de
Lévi et Musso basculent vers mes écrits. Mais je dois quand même
avouer que dans un petit coin de ma tête (au fond, à gauche) je
rêve parfois à une certaine forme de reconnaissance. Au final,
j’espère tout et je ne m’attends à rien.
3- Combien de temps, de tentatives, de refus, jusqu'à aujourd'hui, pour parvenir à décrocher un contrat à compte d’éditeur ?
Je
commence à avoir une belle collection de lettres types de refus.
Pour l’anedocte, je me souviens d’un recueil de poèmes que
j’avais envoyé à un grand éditeur, il s’intitulait :
« petits poèmes de merde… » Le responsable de
collection m’avait répondu qu’un type comme moi ferait mieux
d’aller brûler en enfer, accompagné de mes textes, pour avoir osé
choisir un titre comme ça ! Bah…d’autres ne se donnent même pas
la peine de répondre, mais heureusement il existe aussi des éditeurs
qui argumentent leur refus ou qui téléphonent pour te dire que
c'est presque ça, qu'il faut continuer, ces petits rien
entretiennent la flamme, et même si la déception est souvent
présente, l’envie d’écrire est toujours la plus forte, alors je
serre les dents et je continue (l’énergie du désespoir est un
très bon stimulant.)
4- Pourquoi as-tu commencé à écrire ? Pourquoi continues-tu ?
Au
début c’était pour évacuer ma rage existentielle, exorciser mes
démons, poser mes émotions, mais je n’étais pas sûr d’avoir
choisi le bon médium, alors je m’en suis éloigné et j’ai
cherché à m’exprimer par la photo, les courts métrages et la
fréquentation assidue des comptoirs des troquets parisiens. Mais
j’ai du admettre beaucoup plus tard que mon truc c’était
vraiment l’écriture, et j’y suis revenu. Je me suis essayé à
divers genres (poésie, nouvelles, débuts de roman, scénarios) mais
je manquais de confiance, de volonté et de maturité, mes textes
étaient trop emphatiques, je voulais faire une jolie phrase par
ligne, c'était mauvais. Et puis, avec le temps mon style s’est mis
en place petit à petit, jusqu’au moment où je me suis dis que moi
aussi je pouvais y arriver, ou tout du moins mener un projet jusqu’au
bout. Je me suis donc lancé dans l’écriture de mon premier roman,
et à partir de là, je n’ai plus rien lâché, une véritable
obsession, mais une obsession libératrice, salvatrice, car écrire
fait du bien.
5-
Que penses-tu de la place de l'auteur dans le monde du livre et de
l'édition ?
Je
pense qu’il occupe la place du mort !
7-
Comment serait l'éditeur de tes rêves ? Quelles qualités
essentielles devrait-il posséder ?
Il
doit savoir être franc et direct tout en ménageant la sensibilité
de l’auteur ! Sinon, mettre une limousine à sa disposition,
lui payer sa cantine et des demis pressions de qualité en terrasse
est un plus indéniable pour une bonne entente.
8- Que penses-tu du Trophée Anonym'us ?
Déjà,
c’est un honneur de pouvoir y participer et de me confronter à des
écrivains confirmés,
sans
parler du boss qui m’inspire le plus profond respect (j’ai bon,
là ?) Et puis, je suis sûr que ce trophée va prendre de
l’ampleur, que les média vont s’emparer de l’événement,
qu’un éditeur proposera d’en faire une version papier et que
Scorsese fera péter les contrats d’adaptation.
LES
QUESTIONS DE MADAME LOULOUTE...
1-
Ton dernier livre, c'est plutôt : Une intrigue aux petits oignons ?
Des personnages croqués avec gourmandise ? Une alchimie de saveurs ?
Je
dirai les personnages, même si le style reste très important pour
moi. L’histoire, il en faut une et je ne la néglige pas, mais
disons que ce qui m’intéresse le plus c’est de faire respirer
mes personnages, les travailler au corps et au cœur et les inscrire
dans une certaine réalité sociale.
2-
Tu nous conseilles de le lire : Sur un canapé au coin du feu ? À
l'ombre d'un parasol ? Dans le bruit et la fureur d'une ville
surpeuplée ?
N’importe,
si le livre est bon, le lecteur doit pouvoir faire abstraction de
tout le reste.
3-
Ce livre, c'est plutôt : Divertir le lecteur ? Le faire frissonner
d'angoisse ? Inviter à la réflexion ? Apporter un témoignage ?
Inviter
à la réflexion tout en divertissant le lecteur, c’est le top si
on y arrive. Profondeur et légèreté peuvent faire bon ménage,
c’est une question de dosage.
4-
Ton écriture : Elle est comme Pénélope, qui fait, défait, et
refait chaque phrase jusqu'à ce qu'elle sonne juste ou bien un
premier jet juste retouché pour enlever quelques aspérités ?
Premier
jet d’abord pour ne pas freiner les idées, mais ensuite je
retravaille beaucoup, je relis sans cesse le manuscrit, puis je
décortique mes paragraphes, mes phrases, les enchaînements, les
répétitions, mes fins de chapitre. Je tente de simplifier ce que je
trouve alambiqué, je sacrifie sans pitié des passages que j’aime
si j’estime que cela freine le récit. En général, ce sont les
dialogues qui me posent le moins de problèmes, ils me viennent assez
naturellement.
5-
Ton roman, comme un voyage, est-il : Un chemin au hasard qui
t'emporte et t'oblige à t'adapter aux obstacles imprévus qui le
parsèment ? Un périple longuement planifié, aux escales anticipées
? Un voyage « théoriquement » organisé, mais qui ne se déroule
jamais comme prévu ?
C’est
un chemin (de croix parfois) dont je dois d’abord connaître le nom
et la destination finale avant de pouvoir l’emprunter. Après, je
me mets dans la peau de mes personnages, et pour rester dans la
métaphore forestière, j’avance coûte que coûte, même si
parfois il me faut faire de longs détours avant de retrouver la
bonne direction.
6-
Si celui-ci était une boisson, ce serait ?
Un
bourgogne, pinot noir, le genre de cépage qui prend son temps pour
t’enivrer.
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