Cette année, ce sont les auteurs eux-mêmes qui ont concocté les
questions de l’interview, celles qui leur trottent dans la tête,
celles qu’on ne leur pose jamais, ou tout simplement celles qu’ils
aimeraient poser aux autres auteurs.
1. Certains auteurs du noir et du Polar ont parfois des
comportements borderline en salon. Faites-vous partie de ceux qui
endossent le rôle de leurs héros ou protagonistes pendant
l'écriture, histoire d'être le plus réaliste possible ?
Bande de psychopathes !
Non, je n’endosse pas de rôle durant
l’écriture ! Et fort heureusement pour nous tous, car ce sont
mes personnages psychopathes qui occupent le plus mon focus dans mon
travail de rédaction. Mes criminels ne prennent vie que dans mon
imaginaire (tant mieux pour ma santé mentale !) et je ne me
sens pas « proche » d’eux durant l’écriture. Je
dirais plutôt que j’ai un accès à leurs univers et déviances
puisque je les crée et leur donne vie sur le papier. Il s’agit
davantage d’un décentrage de ma part que d’une connivence entre
eux et moi !
2. Douglas Adams est promoteur de 42 comme réponse à la vie,
l’univers et le reste. Et vous quelle est votre réponse définitive
?
Peut-être me serait-il possible de donner ma
réponse si LA question était enfin clairement posée ? En
l’absence de question précise, je m’en tiendrai à 42, qui –
somme toute ! – vaut bien tout autre nombre…
3. Y a-t-il un personnage que vous avez découvert au cours de
votre vie de lecteur et avec lequel vous auriez aimé passer une
soirée ?
Oui, bien-sûr ! Plusieurs mêmes…
J’aurais bien accompagné Arsène Lupin lors d’un de ses
spectaculaires cambriolages, ou partagé un digestif avec Hercule
Poirot dans un des wagons de l’Orient Express, ou encore joué à
des devinettes toute une soirée avec Sherlock Holmes !
C’est assez extraordinaire de constater que
ces personnages (et d’autres) ont tellement bien été incarnés
dans des adaptations cinématographiques et télévisuelles qu’ils
nous semblent presque familiers et avoir existé !
4. Si tu devais avoir un super pouvoir ce serait lequel et
pourquoi?
Un des super pouvoirs dont j’ai rêvé toute
mon enfance était celui de pouvoir voler sans ailes, à l’instar
de Peter Pan ou de Superman. Ce serait merveilleux tout simplement,
de connaître la sensation du déplacement aérien, sans carcan, sans
carlingue, sans moteur… voler tout simplement !
5. Est-ce que tu continuerais à écrire si tu n'avais plus aucun
lecteur ? (même pas ta mère)
Mdr ! Je suppose que oui car écrire m’est
indispensable… Imaginons que je sois seule sur une île déserte,
ceci expliquerait cela ! Il me semble bien que j’aurais besoin
de tracer quelque chose de ma minuscule existence. Il me semble aussi
qu’écrire, c’est s’évader, ouvrir une fenêtre sur un univers
que nous choisissons… Et honnêtement, si je devais être seule sur
une île déserte, j’en aurais bien besoin !
6. Quel a été l'élément déclencheur de ton désir d'écrire ?
Est-ce un lieu, une personne, un événement ou autre ?
Je ne sais pas exactement. Je peux juste dire
que je trouvais l’existence de mes héros fictionnels bien plus
palpitante que celle de mon statut d’enfant. Je me souviens que je
vivais leurs aventures, que je partageais leurs quêtes, que je
frissonnais avec eux… Je trouvais extraordinaire de me plonger dans
les livres… et de quitter ma réalité le temps d’un voyage
imaginaire... Je suppose que l’envie d’écrire vient de cette
magie-là. De cette force d’évasion que permet le livre.
7. Est-ce que le carmin du sang de ses propres cicatrices déteint
toujours un peu dans l'encre bleue de l'écriture ?
Ma couleur préférée après le noir est le
violet. Donc, oui, je crois que le rouge des blessures s’associe
merveilleusement bien au bleu de l’encre !
8. Penses tu qu'autant de livres seraient publiés si la signature
était interdite ? Et toi, si comme pour le trophée Anonym'us, il
fallait publier des livres sous couvert d'anonymat, en écrirais-tu ?
Je ne sais pas s’il y aurait autant de
livres, je n’ai aucune idée de ce qui fait moteur chez les autres
auteurs et je suppose qu’il y a des réponses très différentes
chez les uns et les autres.
Pour ce qui me concerne, j’ai des manuscrits
sous le coude qui ne verront peut-être jamais la lumière du regard
des lecteurs ! Et je crois que ça me plairait assez qu’ils
soient lus même si je ne pouvais pas en revendiquer publiquement la
maternité !
Je pense que l’on écrit un roman dans
l’espoir qu’il soit lu un jour et que si le livre est un enfant
dont on accouche, on lui souhaite aussi de vivre sa propre vie…
non ? Que l’on soit « reconnu » ou non comme en
étant l’auteur…
Je trouverais plutôt amusant qu’un de mes
livres soit commercialisé anonymement, dès lors que j’aurais
accès aux impressions des lecteurs et que je serais rémunérée à
la hauteur des fruits qu’il porte. Ce n’est pas tant la publicité
de mon nom qui crée pour moi la « vraie » reconnaissance
que l’accueil que peuvent faire les lecteurs à un de mes bouquins.
9. Pourquoi avoir choisi le noir dans un monde déjà pas rose ?
Justement parce que le monde n’est pas rose…
et que c’est le noir de notre monde qui m’interroge et me
bouscule le plus…
Cela étant, je trouve normal que certains
lecteurs puissent alterner des lectures noires et des lectures plus
légères (feel good, romans blancs, burlesque…). Moi-même en tant
que lectrice, j’ai besoin parfois de m’évader dans un univers
drôle ou divertissant…
Mais lorsqu’on écrit – même si j’ai pu
sortir du genre noir dans certaines de mes productions non éditées
– on pioche dans nos centres d’intérêt, nos interrogations, nos
préoccupations… Au travers des livres, l’auteur que je suis
porte un certain regard sur l’Humain, ses dérives, ses déviances,
ses angoisses, ses dangers, ses anomalies… parce que ce sont là
mes intérêts principaux.
10. Quelles sont pour toi les conditions optimales pour écrire ?
Du calme et de la solitude. De la disponibilité
psychique. Du « mauvais » temps avec un feu de cheminée
(j’adore la pluie ou la neige, le genre de météos qui donnent
envie d’être confinés chez soi !). Et un environnement où
l’on se sent bien.
11. Si vous deviez être ami avec un personnage de roman, lequel
serait-ce?
Pour parler d’amitié, il faut certains
ingrédients : complicité, connivence, loyauté, partage…
Beaucoup de personnages principaux, héros de romans noirs, sont
marqués, fracassés par la vie ou bien brillantissimes et, de ce
fait, inaccessibles… Au final, beaucoup sont très seuls et peu
enclins à se faire des amis !
Je
pense donc que si je devais être amie avec un personnage de roman,
ce serait plutôt un personnage de livre pour enfant ou young
adult
– la question de l’amitié tenant souvent une place sous-jacente,
voire dominante… J’aimerais bien, par exemple, être amie avec
Harry Potter !
12. Quel est ton taux de déchet (nombre de mots finalement gardés
/ nombre de mots écrits au total ) ? Si tu pouvais avoir accès aux
brouillons/travaux préparatoires d’une œuvre, laquelle serait-ce
?
Mon taux de déchet diminue de livre en livre,
c’est heureux ! On apprend à éviter certains pièges au fil
de l’écriture, avec l’expérience. Aujourd’hui, j’évalue à
un sixième grand maximum la quantité écrite qui sera finalement
jetée à la poubelle !
Si
je devais avoir accès aux travaux préparatoires d’un livre,
j’adorerais qu’il s’agisse d’une œuvre classique car je me
suis souvent demandé comment les auteurs géraient leurs manuscrits
avant l’invention de l’ordinateur, des copié/collé, des delete
en un clic de souris… Je pourrais choisir « Les liaisons
dangereuses » de Laclos ou « Contes et nouvelles »
de Maupassant (c’est un sacré exercice que celui de la
nouvelle !!!) ou encore « Les dix petits nègres »
d’Agatha Christie, pour être dans le roman noir.
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