jeudi 9 novembre 2017

Un auteur de la team sur la terrasse : Jess Kaan


1. Votre premier manuscrit envoyé à un éditeur, racontez-nous ?

Une nouvelle envoyée à la revue Galaxies, spécialisée dans la SF. Une nouvelle de fantastique et l’impression que la foudre me tombe sur la tête avec une lettre incendiaire. Un coup de pied au séant salvateur. Avec cet épisode peu glorieux, j’ai réalisé qu’il fallait mieux cibler.
Heureusement par la suite, j’ai veillé à toujours cerner mes éditeurs. Le premier texte pro accepté le fut par les éditions Nestiveqnen et là ce fut le cri de joie.

2. Ecrire… Quelles sont vos exigences vis à vis de votre écriture ?

Un directeur de collection m’a dit, écrire c’est 1% de génie, 99 % de travail. Sur le fond, l’idée est bonne mais la proportion est différente à mon humble avis. En tout cas, il faut accepter de bosser, il faut aussi recevoir la critique, faire tout pour progresser. Et il y a de très bons conseils chez Stephen King. Alors c’est simple, j’écris, je me relis encore et encore. J’essaie de faire en sorte que l’histoire offre des perspectives nouvelles pour le lecteur. Faut que je me dise « ouais, ça c’est bien ». Je ne veux pas donner l’impression d’être présomptueux, mais j’écris comme un auteur et je me relis comme un lecteur.

3. Ecrire… Avec ou sans péridurale ?

Sans. Il faut souffrir, s’impliquer, faire preuve d’empathie, ne pas juger les personnages y compris les pires. Raconter la vie qui n’est ni blanche, ni noire.

4. Ecrire… Des rituels, des petites manies ?

Du silence, certains horaires plus propices, virer les chats de la table, même si cela confine au supplice de Sisyphe. Avoir à disposition les recherches que l’on a faites. Ne pas hésiter à se lever et à quitter l’ordi si ça ne vient pas.

5. Ecrire… Nouvelles, romans, deux facettes d’un même art. Qu’est ce qui vous plait dans chacune d’elles ?
Ce sont deux exercices radicalement différents. Dans la nouvelle, il faut que les personnages soient très vite installés, on est plus sur le fil du rasoir que dans le roman. Par ailleurs la nouvelle réclame une chute efficace, j’adore quand le lecteur doit continuer de se faire son film. Moi, je crois que c’est le plus beau cadeau qu’un auteur puisse faire. Le roman, lui, nécessite des rebondissements, un scénario qui a le temps de se déployer, mais le final est toujours difficile C’est dur de quitter les personnages avec lesquels on a vécu une année ou plus.

6. Votre premier lecteur ?

Mon épouse. En tant que béta lectrice impitoyable.

7. Lire… Peut-on écrire sans lire ?

Peut-on vivre sans respirer ? Non, pour l’écriture, c’est pareil. Lire est un plaisir obligé, lire de tout, les collègues, les essais, les revues, la presse, les classiques. Ne pas se focaliser sur un genre. Un auteur qui dit « j’écris, je ne lis pas, c’est comme un musicien qui dit je n’écoute pas de musique.»
On a besoin de s’imprégner, de se délecter des écrits des autres.

8. Lire… Votre (vos) muse(s) littéraire(s) ?

Ca dépend. J’aime Giebel, Favan, Abel pour leur manière de nous précipiter dans les abîmes. J’aime King pour sa capacité à restituer une atmosphère. J’adore Masterton, Chattam, Herbert, Cussler, Graham, pour leur capacité à engendrer ce que je nomme de la littérature adrénaline, celle qui vous fait monter la pression et que vous dévorez… J’aime la belle plume de Lemaitre, j’apprécie Robin Cook et ses thrillers médicaux et je relis périodiquement les Lettres de mon moulin… Il faut s’ouvrir, tenter des expériences littéraires, je suis inscrit dans une médiathèque où je pioche au hasard de la littérature blanche. C’est un truc que j’adore

9. Soudain, plus d’inspiration, d’envie d’écrire ! Y pensez-vous ? Ça vous est arrivé ! Ça vous inquiète ? Que feriez-vous ?

L’inspiration ne manque pas.
En revanche, la perte de l’envie d’écrire ça m’est arrivé avec l’annonce de ma maladie. Je suis resté trois mois sans écrire ne serait-ce qu’une ligne, ça m’arrivera encore. Un jour ce sera si fort, que peut-être je m’arrêterai. La vie est curieuse, elle réserve son lot de surprise. Il faut essayer de vivre au jour le jour, savourer les joies simples.

10. Pourquoi avoir accepté de participer au Trophée Anonym'us ?

Y a un certain Eric qui m’a harponné à Templemars, il m’a fait peur avec son accent du Sud et son look d’auteur de polar. Je me suis dit ça y est j’ai un contrat sur ma tête, à la sortie une moto va débouler et on va me dézinguer… Donc j’ai accepté. Plus sérieusement, c’est un challenge, l’opportunité de se confronter aux autres auteurs de façon amicale, d’être lu et de présenter ce que j’écris…

11. Voyez-vous un lien entre la noirceur, la violence de nos sociétés et du monde en général, et le goût, toujours plus prononcé des lecteurs pour le polar, ce genre littéraire étant en tête des ventes?
L’homme est voyeur par nature. Notre époque est instable, les repères se cassent la figure, comme les idéologies. On nous vend du sans âme en guise de projet de société (faire du fric, des affaires, baiser en série, collectionner les gadgets technologiques, bouffer ça ou ça, aller là ou là) et forcément, cela n’engendre que le chaos, parce que chacun de nos choix a des répercussions. Quand on achète un smartphone, on fait trimer des mecs à l’autre bout de la terre. Plus que le bulletin de vote à l’efficacité limitée, un achat est un acte politique désormais. Mais je pense que dans le polar, il y a une part d’espoir. Je sais, ça fait moraliste, je suis naïf, mais j’assume. Dans le polar, dans le thriller, on a envie que les héros se dépassent, qu’ils vainquent le Mal incarné par une menace assez clairement définie. C’est tout de même plus facile de mettre hors d’état de nuire un odieux salopard de roman que de se dire dans la vie de tous les jours, il faudrait que tellement de choses changent, que nous abattions nos égoïsmes. Parce que la société ne va pas mal à cause des autres, mais à cause de chacun.

12. Vos projets, votre actualité littéraire ?
Sortie de Punk Friction aux Editions Lajouanie et de l’anthologie DONS à l’atelier Mosesu pour soutenir l’ADOT (Asociation pour le Don d'Organes et de Tissus humains)
En ce moment coécriture d’un roman de fantastique avec Frédéric Livyns, un auteur belge. Ecriture d’un thriller sur un thème qui me tient à cœur et deux policiers historiques dont une suite du secret de la petite demoiselle.

13. Le (s) mot(s) de la fin ?
Je ne suis pas doué pour les interviews, mais merci à vous de m’avoir lu.


Une interview réalisé en partenariat avec le blog partenaire Lila sur sa terrasse

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